J'étais là d'une certaine façon!
J’aurais aimé être à Soweto, j’aurais aimé vivre cette ambiance incroyable de deuil et de fête, j’aurais aimé prendre le bus ou le métro tôt ce matin comme de milliers des sud africains, j’aurais aimé marché sous la pluie pour arriver au Soccer City, j’aurais aimé danser, chanter et écouter les discours, j’aurais aimé hué sur le président sud africain et partir lorsqu’il a commencé son discours fleuve, j’aurais aimé faire tout ce qu’ont fait les milliers des personnes qui étaient présentes en Afrique du Sud ce mardi 10 octobre 2013.
Seulement, je n’ai rien fait de tout cela. Physiquement du moins ! Par contre, je n’ai pas manqué une seule miette de la retransmission des hommages à Madiba. J’ai vu une concentration incroyable des chefs d’états et anciens chefs d’état jamais vu, je ne pense pas qu’au Palais de Verre à New York on puisse voir cela. J’ai vu la bise, sur la bouche, de Winnie à Graça ; j’ai vu la tendresse d’Obama pour la veuve de Madiba ; j’ai vu la poignée de main entre le président américain et Raùl Castro, le cubain ; j’ai vu Hollande et Sarkozy ensemble et j’ai vu des instants incroyables ! Merci Madiba pour avoir d’une certaine façon contraint ces grands à ce genre de geste.
Au-delà de cet aspect un peu people, j’ai suivi avec intérêt les différents discours. J’ai été ému par les petits-enfants de Madiba et son ex compagnon de bagne, j’ai été séduit par Ban Ki-moon. ‘’L’Afrique du Sud a perdu un héros, nous avons perdu un père, le monde a perdu un ami cher, un mentor. Nelson Mandela était bien plus qu’un des plus grands leaders de notre temps’’ a dit le secrétaire général de l’Onu. Il a su trouver les mots pour traduire ce que le monde entier pense.
Celui du président américain, la star de la cérémonie, m’a conquis. Je retiens cet extrait : ‘’il y a trop de dirigeants qui clament haut et fort les biens faits de la solidarité tout en ne permettant pas à leur propre peuple de s’émanciper’’. Loin d’être le meilleur discours de sa carrière, celui-ci a le mérite d’avoir rabattu le clapet à tous ses dirigeants qui, depuis l’annonce du décès de Nelson Mandela le 5 décembre dernier, appellent à pérenniser l’héritage du sage. Ils y vont de leur petite phrase pour amuser la galerie. Ils décrètent des périodes de deuil pour se donner bonne conscience (10 jours au Congo-Brazzaville).‘’Nous devons poursuivre l'oeuvre de Nelson Mandela afin que l'Afrique prenne la place qui lui revient dans la communauté internationale’’ dixit Denis Sassou-Nguesso, le président congolais, dans les Dépêches de Brazzaville (numéro 1883 du 9 décembre 2013). Ce type de phrase en dit long sur le mépris et le cynisme que les dirigeants africains ont pour leurs concitoyens. Dans tout ça, ils oublient que la meilleure façon d’honorer sa mémoire est d’être solidaire et juste, d’être des guides éclairés pour leur peuple.
Et c’est ce que le président américain a tenu à leur rappeler d’autant plus que certains chefs d’état à la réputation sulfureuse et qui ne veulent pas céder le pouvoir étaient assis tranquillement dans les tribunes.
Qu’ont-ils ressenti en écoutant ce discours ? Que se sont-ils dit intérieurement ? Je donnerais tout pour le savoir mais je ne le saurais jamais. Je pense plutôt qu’ils n’en tiendront pas compte, pour eux ce n’est qu’un discours de plus qui n’apportera rien. Ils n’écoutent qu’eux-mêmes ou leurs griots et ils se sentent investis d’une mission divine. Est-ce qu’un simple discours peut avoir d’effet sur eux ? Eux qui ont su museler l’opposition, la presse, les syndicats et transformer leur peuple en des simples pantins. Eux qui sont passés maîtres dans l'art de s'enrichir illicitement!
Madiba est parti, le monde continuera à tourner avec son lot de problèmes. Les dictateurs seront toujours en place en train de mijoter des stratégies pour s’éterniser au pouvoir, les peuples seront toujours dans la peur.
Les idées de Nelson Mandela comme celles de Patrice Lumumba ou Steve Biko ne seront pas suivies par la grande majorité. Elles seront reléguées aux oubliettes. Alors, j’ai aimé ces instants, le temps d’une cérémonie j’ai eu l’impression que le monde était merveilleux.
Pourtant c’est loin d’être le cas. Merci qui ? Merci Madiba !
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