Le Cahier d'Anthony Mouyoungui

Un week-end durant, du 17 au 19 janvier 2014, le Hang’Art à Aubervilliers (nord-est de Paris) a abrité l’exposition ‘’Retour à Brazzaville’’ consacrée au séjour de Sophie Gillmann et Sylvain Trousselle dans la Capitale congolaise. A travers les photos et le film documentaire, les spectateurs ont pu vivre les moments importants de ce retour rêvé par Sophie depuis plus de trois décennies. Maintenant que le voyage de toute une vie a été réalisé, la photographe peut maintenant envisager sereinement l’avenir sans pourtant oublier ses années d’enfance à Brazzaville ni ce séjour !

Des centaines de photos sur les murs, en différents formats, elles illustrent le parcours de Sophie et Sylvain à Brazzaville. Les instants les plus marquants, les rencontres avec les brazzavillois. 32 ans d’attente et un bref séjour résumés sur ces images que le public, composé en majorité de parents et d’amis, n’arrête pas de regarder. Chacun posant les questions pour avoir plus d’explication.

Chaque fois, le clou de la journée a été le film documentaire qui montre, en mouvement et en son, les étapes de cette quête aux souvenirs ou recherche du passé. Pendant une heure et quarante cinq minutes, il tient le spectateur en haleine. Personne n’ose parler tellement captivé par les images et par le récit lu soit par Sophie soit par Sylvain.

‘’Je ne me rappelle de rien mais je me rappelle de tout’’ se dit Sophie consciente du caractère insolite de sa démarche. Revisiter les paysages de son enfance n’est jamais une chose facile d’autant plus qu’elle ressentait une certaine peur. Une fois à Brazzaville, elle se demandait comment elle serait accueillie sur place. ‘’J’avais peur mais c’est parti au bout d’un jour. J’avais l’impression de retrouver tous mes repères. Comment on est avec les gens ? Comment on discute ? Mes repères sociaux. Ce qui m’a étonné c’est que les gens me disaient que je suis congolaise !’’ ajoute t-elle avec sourire. Elle n’aurait jamais imaginé être considérée comme une enfant du pays. ‘’En France, on ne dira jamais à un congolais qui y a vécu que c’est un français !’’ signale t-elle. Une façon de marquer la différence d’attitude entre les congolais et les français.

‘’Tout a changé mais les souvenirs me reviennent’’. Elle était enfin chez elle ! Elle pouvait partir à la recherche de ‘’sa’’ maison.

 Pendant des années, elle ne croyait pas tellement en son histoire, ‘’j’ai l’impression d’être dans un délire’’. Elle a revu la maison, intacte comme dans son souvenir. La maison, seul élément palpable de son passé encore présente. ‘’C’était le plus concret, elle n’a pas changé. Je m’étais préparée à ce qu’elle n’existe pas, je n’étais pas préparée à ce qu’elle existe. Le fait qu’elle existe était encore quelque chose de plus irréel ! J’avais l’impression de marcher dans mon passé. C’était un peu fou !’’ explique Sophie !

Elle a revu la maison, elle l’a touchée, elle a dormi dans sa chambre d’enfance, elle a dansé au bord de la piscine, vide pendant son séjour, sous la véranda et elle a marché dans le jardin. Elle ne voulait rien laisser passer, elle voulait tout voir, elle a visité son école maternelle à Saint-Exupéry ! Elle a fait le tour de la ville, elle a rencontré les artistes (Russel Morley, Stan Matingou ou Sorel Boulingui par exemple), elle a dansé avec les artistes de la place, elle a visité un orphelinat et elle est montée sur le toit de la Tour Nabemba comme un clin d’œil à son papa. Elle ne voulait

Son histoire a fait le tour de la ville et elle a attiré d’autres personnes qui avaient le même problème à l’image de la camerounaise, que l’on voit dans le film, qui avait quitté précipitamment Brazzaville en juin 1997.

Le départ pour Paris fut tout aussi difficile que celui d’il y a 32 ans ! La seule différence est que maintenant, la boucle est bouclée. Elle a arrêté de marcher en arrière, maintenant ça fait parti du passé. ‘’Je suis rentré dans le présent’’ conclu t-elle, enfin libérée et guérie, le regard tourné vers le futur.

                                                Sylvain et Sophie